Cabinet Bibal

Audience du 16 novembre 2021

Audience du 16 novembre 2021
Analyse sociologique du djihadisme

La présence de certains témoins est au centre des débats.

La question posée est la suivante « que peuvent-ils nous dire sur les faits reprochés aux accusés ».

Les inquiétudes manifestées par les avocats de la défense sont celles d’un procès politisé et instrumentalisé.

Pourtant, le témoignage de M. MICHERON, enseignant chercheur en sciences politiques, sociologie et géopolitique, contre lequel il avait été porté opposition est éclairant sur l’idéologie djihadiste moteur des agissements reprochés aux accusés.

Ce témoin expose comme base que le djihadisme n’est pas réductible aux attentats et aux organisations qui l’incarnent.

M. MICHERON décrit le djihadisme comme une idéologie persistante avec des pics d’émergences, de destructions et de reconstructions.

Il fait le constat d’un phénomène qui s’accélère avec une dynamique européenne depuis plus de 30 ans et une spécificité géographie d’Europe de l’Est.

D’où viennent les djihadistes européens ?

Principalement de sept pays européens : la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, le Danemark et la Suède.

Il décrit une dynamique locale liée au tissu social et à l’environnement humain ne se superposant pas systématiquement avec une marginalisation sociale.

Depuis une dizaine d’années, les « pionniers » européens en Syrie présentent un profil distinct.

Ils apportent au-delà d’une idéologique une logistique, ils sont intégrés dans les structures syriennes et maintiennent en Europe le développement d’un réseau actif qui peut se déplacer facilement.

M. MICHERON insiste sur la nécessité de sortir de ses propres valeurs pour comprendre cette idéologie et d’avoir une dimension multifactorielle sociale, politique et religieuse.

A ce titre, il note la faculté des djihadistes européens de passer d’une logique d’un individu né en Europe à celle d’un individu né sous DAESH expliquant leur aptitude dans le choix de cible, en matière de propagande et de justification de leurs actions.

Sur la « logique » des attentats, M. MICHERON explique que la France est présentée comme une usine à idées du monde occidental et que la frapper implique une énorme résonnance, un « fantasme djihadiste par excellence ».

Concernant les motivations clamées par les terroristes, M. MICHERON rappelle l’exigence de travailler en dehors de son propre référentiel.

Il rappelle la valorisation par DAESH du combattant et du martyre, et d’un apprentissage à cette formation idéologique chevillée au corps.

La capacité de donner la mort, l’intelligence de la rue, la violence sont idéologisées pour fournir un prétexte aux actions menées.

L’objectif recherché : créer du débat et générer un impact psychologique.

Ce témoignage s’achève ainsi avec la sensation de mieux appréhender les fondements d’une construction doctrinale ayant généré les terroristes des attentats du 13 novembre 2015, et permet sans doute de mieux comprendre la personnalité des accusés.

Estelle DHIMOLEA